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Les trails de Tony
12 juillet 2015

Un Tour en Terre du Jura, 115 km, 6500 D+, sur 2 jours

uttj etape 1

uttj etape 2

Ce rendez-vous « trail » est pour moi, le sommet de mon année. Je vais parcourir sur deux jours 115 km avec 6500D+, 56 km et 3800D+ le 1er jour et 59 km et 2700D+ le deuxième jour. Je m’interroge sur ma capacité à repartir le deuxième jour. Je n’ai jamais fait ce format de course.

Mon dernier ultra remonte seulement à 6 semaines, ai-je assez récupéré ? L’enchainement sur une période aussi courte est un test pour jauger ma capacité à faire dans un futur prochain des ultras de 160 km et 10000D+.

Pour une fois, j’ai décidé de prendre mon vendredi et de partir tranquillement vers le Jura. Je suis confiant car entre temps, j’ai enfin récupéré mon tapis de course, qui me permet de simuler des inclinaisons de 15%. J’ai fait de nombreuses séances de marche et j’entrevois une meilleure préparation. Pour ceux qui connaissent la maison, celui-ci est placé dans la dépendance. L’autre fonction de la dépendance est de faire sauna l’été, donc ma préparation s’est faite par 35 degrés et, vu les conditions caniculaires sur la France, cela va être utile.

Direction Saint-Claude dans le Haut Jura pour le retrait du dossard et enfin Thoiry, où m’attendent Marion et Cédric mes hôtes de ce we.

Petite anecdote d’un skieur du Jura, charrié par ces homologues savoyards sur leurs petites stations de ski, en réponse il leur signifia qu’ils avaient la plus belle vue sur le massif du Mont Blanc. Effectivement quand vous basculez du col de la faucille vers le pays de Gex la vue au coucher du soleil sur le Mont Blanc est splendide………..

J’aurai bien envie d’une bonne bière avec mes hôtes, mais il faudra attendre.

Soudain, mon téléphone sonne, ma chérie m’appelle pour la deuxième fois de la soirée, je lui manque déjà. Au son de sa voix je sens une pointe d’inquiétude, elle m’interroge si je n’aurai pas oublié le clip de ma poche d’eau sur l’évier.

Et comme habitude, voilà ma première connerie, je me retrouve sans poche d’eau pour demain matin. Un petit vent de panique circule autour de moi, vite je pars sur la solution de petites bouteilles d’eau dans mon nouveau sac de trail.

Un petit test en live, je place les bouteilles dans les filets accessibles par l’arrière et le tour est joué ! J’imagine la tête de Matthieu s’il avait été à côté de moi.

Merci mon amour car sans toi……………..le reste je te dirais plus tard.

Petit Dodo, et me voilà parti 5h30 du matin, de nouveau vers le col de la faucille et le col du Bayard. Je m’arrête et je respire cette nature sauvage, brute, un silence étourdissant m’entoure, deux magnifiques renards gambadent dans les prés.

La journée va être belle.

7H départ de la course, l’ambiance est bonne, je me sens serein, calme, mais surtout décidé à faire ma course. Je regarde les autres coureurs et j’ai l’impression d’être un intrus parmi tous ces « montagnards » moi, coureur de plaine.

C’est parti.

départ

Les jambes sont bonnes, foulée déliée, je pars plus vite que d’habitude. La première partie du parcours 26 km est une boucle pour revenir vers Saint-Claude. Le paysage est splendide nous longeons une rivière, vasques et petites chutes, le tout à l’ombre. Première ascension le col Bayard, tout se passe bien, je reprends des concurrents.

chute eau

Les 26 premiers kilomètres se passent comme dans un rêve, j’arrive en 4h10, relativement frais, nous plongeons vers Saint-Claude, il est 11h du matin, et la chaleur se fait brulante. We caniculaire dans l’est de la France.

rivière

Je prends mon temps au 1er ravito, mon sac est super, les petites bouteilles sont accessibles, et je m’aperçois que je bois davantage avec ce système, presque heureux de mon oubli.

Me voilà reparti, pour deux ascensions abruptes, la première est un vrai calvaire, le pourcentage est élevé et me coupe les jambes, tout le monde est à l’arrêt. Ils ont tiré une ligne droite dans la pente, la fatigue arrive. Interminable, enfin, la délivrance, le replat est là, de surcroit en sous-bois, je me refais un peu la cerise. Mais la fête est finie, je suis entré dans mon ultra.

escaliers

La deuxième ascension est pour moitié plein soleil, nous longeons les lignes à haute tension, en azimut, le sommet, les crêtes. S’ensuit une succession de descentes, de bosses, je me sens aussi bien que l’on peut l’être au bout de 9h d’effort.

Patatra, je ressens une douleur sous le pied, dans une descente, une ampoule est en formation.

D’un coup, tout va mal, je lâche complétement mentalement. Je n'arrive pas à reprendre le contrôle, je suis prêt de l’abandon.

Je ne cours plus, les concurrents me doublent un à un, je marche, plutôt je déambule. J’arrive enfin à me concentrer pour calculer la distance restante et les barrières horaires. Je m’aperçois que j’ai de la marge, et un petit détail vient me réconforter : tous les concurrents dont le temps est inférieur à 11h d’effort sur cette première étape, prendront le départ une heure plus tard le lendemain. Du coup, je me trouve une bonne raison pour éviter une heure de soleil, de prendre mon temps. Je finis l’étape en marchant, avec quelques séquences de courses, afin de préserver au mieux mon pied droit.

Enfin l’arrivée sur Mijoux, en 11h39, je suis soulagé. Toute ma concentration se porte sur les choses à faire pour récupérer au mieux.

Je découvre avec soulagement que l’ampoule est de petite taille, avec peu de liquide. Je décide de la percer.

Vite, j’installe ma tente, pour me faire un chez moi, m’isoler, enfin presque car je suis en plein milieu de l’arrivée... (cf.photo ci-dessous). Le moral remonte.

bivouac2

Je cours vers la douche, l’eau est glacée 10°. Impossible de mettre le haut du corps sous l’eau, mais pour la récupération des jambes c’est extra.

Je file ensuite vers le massage. Une table se libère après une longue attente et le kiné répare tous mes petits bobos. C’est bon, bon, bon.

Je me retrouve dans le réfectoire à manger ma blanquette, ce plat chaud est salvateur.

Vite au dodo. Seul hic est que je suis proche du générateur du ballon gonflable de l’aire d’arrivée. Le sommeil ne vient pas, la nuit est chaude bien que nous sommes à 1000 mètres d’altitude.

La nuit est courte : réveil à 4h30.

La sortie de tente est pathétique, j’ai l’impression d’être aussi raide que le robot de star wars  C-3PO. Je m’attèle rapidement à ranger ma tente, et quel boulot ! Fourbu après cet effort, j’attends le départ de cette deuxième étape, qui est censé être moins difficile que la première avec « 59 km pour 2700D+ ». D’ailleurs, en observant les résultats des années précédentes, les concurrents mettent des temps proches pour les deux étapes. Je devrais en conséquence finir dans les temps si l’on suit cette règle. Il faut bien trouver des faits pour se rassurer !

Le peloton s’est dégarni. La rumeur signale un taux d’abandon de 30% sur la première étape, notamment due à la chaleur caniculaire.

6h du mat, 3, 2, 1 le départ est donné, premier plat du jour, l’ascension vers les crêtes du haut jura et ses vues sur le lac de Genève et le Mont Blanc.

Cette ascension est bienvenue, elle permet de s’échauffer tout en marchant, ensuite le chemin le long de la crête est splendide. J’arrive à alterner marche, course.

panorama

Les descentes sont horribles, j’ai éclaté tellement de fibres la veille que je préfère encore les montées. La journée va être longue, rapidement la vague des 7h me rattrape, je vois enfin la tête de course. Les gars ne courent pas très vite dans les ascensions, mais ils sont au train, régulier, en revanche dans les descentes, ils envoient.

Les heures passent, j’avance à mon allure, mais j’avance. La chaleur est moins forte que la veille.

L’ascension de Chalam est une horreur, plein soleil, avec plein de randonneurs sur un petit single. Je crains la descente, mais miracle, pour la descente le chemin s’élargit et la pente devient devient plus douce.

J’apprends au ravito suivant, que je possède deux heures d’avance sur les barrières horaires. Je souffle. Je pourrai être dans les délais même si je dois finir en marchant.

Cette deuxième étape est plus sympa en termes de paysage, l’horizon est plus dégagé, les vues aériennes sont sympa, les kilomètres s’enchainent, quand survient l’inévitable mais au pied gauche cette fois-ci, l’ampoule tant redouté. Mon moral ne plonge pas comme la veille, la certitude de finir chasse les mauvaises pensées. D’autant que la douleur est largement supportable.

panorama j2

La chaleur en ce milieu d’après-midi est à son paroxysme, les dernières bosses finissent par avoir raison de moi. Les derniers kilomètres sont pénibles, ma vitesse moyenne est faible et les kilomètres ne s’enchainent plus. Je n’arrive plus à m’alimenter depuis plusieurs heures, seul le coca mélangé avec de l’eau gazeuse m’apporte un peu d’énergie.

Mais la joie de finir me fait tenir, je vais enchainer mon deuxième ultra en 6 semaines. Je suis fier de moi, soudain, je bascule sur Saint-Claude, les derniers hectomètres urbains, l’arrivée dans un presque anonymat.

panorama j2 2

Le sort des derniers, pourtant, il y a beaucoup de monde autour, chacun vaque à ses occupations. Je suis dur, il y a quand même quelques regards, voir des sourires à mon encontre. Ces aventures ne peuvent être vécues que seul, et pourtant de nombreux participants sont en groupes. C’est une interrogation pour moi : comment font ils pour supporter l’autre, vivre pleinement ce moment ? Je dois avouer que le réconfort me manque, personne.

Ma préoccupation est de récupérer, au plus vite, ma tente et de repartir chez Marion et Cédric, sentir un peu de chaleur humaine.

Je n’en reviens pas, je l’ai fait. Je vis ces moments comme une quête intérieure, impossible de renoncer à les vivre, je me perdrais.

Le temps des doutes suite à l’Aurélien Trail me parait loin.

Marion et Cédric m’accueillent en « héro », c’est bon.

marion

Je n’ai plus qu’à me laisser dorloter, très vite le sommeil m’emporte.

Je suis parmi les 55% de rescapés du premier jour, mon classement, loin des premiers, mais j’ai tenu sur les 23 heures cumulées des deux jours.

Un énorme merci à Marion et à Cédric pour votre accueil.

Epilogue : mes pieds ont souffert, mes chaussures aussi...

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