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Les trails de Tony
27 septembre 2015

Le Trail des Aiguilles Rouges, 52,5 km, 3900 D+

PROFIL

C’est une aventure que l’on voulait faire depuis longtemps Matthieu et moi. Il représente pour nous, l’essence du mot trail. Une course de montagne, dans des paysages magiques, le balcon sud du Mont Blanc.

Une course de montagne avec ses 50 km et 4000D+, ses passages à 2500m, à faire dans le temps maximum de 13h30. Les premiers flocons de neige sur le massif des aiguilles rouges rendent l’aventure encore plus excitante.

Nous sommes heureux d’avoir un dossard, en quelques jours, les 650 dossards sont distribués. C’est une dérive du succès du trail. Malgré, la multiplication des courses, l’engouement, fait naitre un afflux de nouveaux coureurs. Si bien, qu’on doit prévoir 6 mois à l’avance son programme. Nous devons guetter les ouvertures des inscriptions, c’est comme faire la queue pendant des heures pour avoir des billets pour un concert. Pour les amoureux du courir libre, ça devient insupportable.

La course intervient à un mauvais moment pour nous deux, la forme est absente, mais je crois que pour rien au monde ni l’un ni l’autre souhaite renoncer.

Le départ est donné au milieu de Chamonix, même endroit que l’UTMB, un mois plus tôt, le début du parcours correspond à celui de la fin de l’UTMB.

Départ, rapide 12.5 km/h sur les premières portions de bitume pour sortir de Chamonix. Très vite, la pente ramène à la raison un bon nombre de coureurs.

Je suis calé derrière Matthieu. C’est super sympa d’être avec lui, de faire la course ensemble. Chacun dans son effort, juste dans son pas.

Je sens dès les premiers raidillons que je suis incapable de suivre l’allure, les jambes sont coupées, dès que la pente s’élève fièrement. Je reviens sur les portions planes. Le peloton ne chôme pas, impressionnant, tous ces coureurs lancés dans la nuit éclairée par une presque pleine lune. La farandole des frontales illumine la montagne.

La première heure passe, je suis toujours dans l’excitation, du départ, l’adrénaline est toujours présente. Soudain, je m’aperçois que la lumière de ma frontale fléchit pour s’éteindre d’un coup, il est 5h30, nous venons de passer la Flègere direction l’index par la tête aux vents. Un moment de panique m’envahit, le voyant de charge était au maximum, et je n’ai pas pris la peine de recharger.

Dans ma déconcentration, je perds de vue Matthieu, je m’accroche aux faisceaux lumineux des autres coureurs. Ma progression est hasardeuse, je manque plusieurs fois de m’étaler, pour finir à terre.

Soudain, je vois Matthieu sur le bord du chemin, il est 6h00 du matin. Je suis content de le retrouver, cela me rassure. Je suis étonné d’être toujours dans son allure malgré ma péripétie. Je lui fais part, du souci, évidemment, il me charrie, à raconter sur le blog. Il me propose de passer devant, pour m’éclairer, mais très vite, je change d’approche, être derrière m’apporte plus de confort visuel.

Entre temps, j’ai pris une deuxième buche, j’ai eu peur que la course s’arrête à cet instant. Je commence à faire des calculs, il me faut tenir une heure pour que poignent les premiers rayons du soleil.

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Mon regard se porte sur le massif du Mont blanc, quelle beauté, seules les parties neigeuses réfléchissent dans la nuit grâce à la lune.

Vers 6h30, Matthieu me signale le lever du jour, les sommets cotés Suisse sont enveloppés dans un orange tandis que le sommet du Mont-Blanc est rose.

Au-delà, du spectacle, mon angoisse prend fin, l’intensité lumineuse est suffisante pour être autonome. Je respire.

Enfin presque, j’ai des difficultés à rester dans la foulée. Je lâche inexorablement. Je pointe à 45 secondes au premier pointage.

20150927_083241

Je prends conscience que je ne me suis pas ravitaillé sur cette première partie de course, aucune envie, aucun temps mort. Impossible de boire, l’eau m’écœure, et ma première barre de céréales est durcie par le froid, je dois m'y reprendre en 3 tentatives sur la demie-heure suivante pour en venir à bout. J’arrive au premier ravito, je retrouve Matthieu, arrivé 2 minutes avant, moi, il repart plus tôt.

20150927_083245

J’ai envie de le retenir, mais je le laisse s’en aller. Il me dit qu’on se retrouve plus bas, en pensant que j’allais revenir sur lui.

Malheureusement, on ne se reverra plus avant la fin de la course. Sur la portion suivante d’une heure trente je vais perdre 15 minutes qui nous sépareront jusqu’à la fin.

Je repars du ravito après m’être forcé de manger un peu. J’aurai du jeter mon eau et remplir ma poche avec de l’eau gazeuse et du coca. Ce que je vais faire au deuxième ravito, c’est-à-dire au bout de 7h30 d’effort !

Je repars, le paysage est minéral, abrupte, des petits lacs se dessinent en contre bas du chemin, incroyable. La ligne de crêtes ralentit tous les coureurs, l’altitude, les rochers, le verglas, côté nord du col de la Glière et du col du Brévent fond chuter ma moyenne horaire à 3 km/h.

20150927_083911

Au sommet du col du Brévent, j’ai que 10 minutes d’avance sur la barrière horaire, à partir de ce moment, mon esprit se focalise sur tous mes mouvements, un seul but, finir dans les délais.

photo 1

Enfin, je commence à redescendre, vers 1600 m, l’alpage revient, je recommence doucement à courir, vers le refuge d’Anterne.

photo 2

C’est un chemin traversé par de petits ruisseaux, l’herbe est spongieuse, le sol souple, procure un plaisir fou. Je traverse le Diozaz, et j’aperçois au loin le refuge d’Anterne, je le pense proche, l’ascension prendra une éternité.

Malgré, le relief dégagé, je n’aperçois pas Matthieu.

Arrivé au refuge, le deuxième ravito m’attend. J’arrive avec 17 minutes d’avance sur la barrière horaire, je repars 5 minutes avant la fermeture. Je me précipite sur une soupe, quel délice. Je vide mon eau, j’ai bu qu’un litre sur les 7h30 d’effort passé. Bonne nouvelle, je suis assoiffé et affamé, c’est bon signe.

Je réorganise mon sac, il apparait trop minimaliste, une fois mes couches de nuit rangées. J’ai une bosse dans le dos, tant pis, je continue.

Me voilà reparti, prochaine étape, le ravito de Servoz, j’ai une heure 1h45 pour y arriver.

La première partie, de cette nouvelle portion est un chemin de randonnée, bordé de petit lacs. Ma progression est lente, je m’accroche littéralement aux basques d’une nana. Mes forces reviennent, je fais la descente, je m’oblige à chaque mètre de replat à relancer pour grappiller du temps. Les cuisses sont tétanisées, brûles, et pourtant, je sens que la course se joue à cet endroit.

Le bâton marque le chemin...

Je fais une pause dans ce récit, réflexion faite, je ne peux pas passer sous silence un moment très fort de la journée.

Tant pis, mon amour si cela va renforcer tes craintes, ton inquiétude pour mes prochaines escapades.

Un hélicoptère fait des rotations au-dessus du chemin, et je comprends bientôt, pourquoi. Un coureur est allongé, médicalisé dans la descente, une mauvaise chute, les médecins sont présents.

Je m’écarte, je n’ose pas le regarder, je continue mon chemin…….

Dans les fractions de secondes suivantes, j’ai une baisse de tension, un frison parcourt mon corps. Je me vois foncer dans cette descente, peu technique au demeurant. La frénésie d’arriver au plus vite l’emporte, et irrésistiblement, je reprends mon rythme.

Enfin, les premières maisons, le chemin disparait pour des portions de bitume. Je dois arriver avant 14H pour franchir cette barrière horaire, il est 13h55 à ma montre et je ne vois toujours pas le ravitaillement.

Des spectateurs, bon signe, j’entends l’église du village sonner deux coups, je donne tout, j’arrive à 14h04…….

Il bip mon dossard, c’est bon, je vais pouvoir continuer.

Le Mont Blanc

A peine le temps de souffler, que l’organisation nous demande de repartir du ravitaillement. J’ai juste eu le temps de recharger 500 ml de Saint-Yorre dans une gourde. Je suis épuisé.

Me voilà obligé de repartir pour le point final, l’arrivée, mais entretemps je dois défier le Prarion, une ascension de 6 km pour 1200D+

La sortie du village se fait aux petits pas.

J’ai 2 heures 45 minutes pour faire cette section de parcours. Je décide dans ma tête, de faire deux heures au train, et une dernière à bloc. J’ai un repère, aux deux tiers de l’ascension le col de la Forclaz.

J’ai un net regain de force, je monte finalement à ma main, sans m’affoler, la première partie de l’ascension est raide. La pente devient moins rude, le col de la Forclaz est en vue, je passe avec 10 minutes d’avance sur mes prévisions, si j’ajoute mon quart d’heure perdu à Servoz, je suis dans le bon tempo.

Dans le doute, je décide d’accélérer la cadence, je suis survolté, je remonte un grand nombre de concurrents. Le sommet est en vue, j’arrive au Prarion à 16H39, j’aurai mis 2h25. Je suis heureux, j’entrevois la fin. Je me vois déjà avec mes 20 minutes d’avance à l’avant dernière barrière horaire, soufflé.

Le sentiment d’euphorie va durer quelques secondes, le pointeur me signale qu’il me reste 1h20 pour rallier l’arrivée et que cela risque d’être dur. Sur le coup, je ne comprends pas, 6 km en descente en 1h20, cela me semble jouable, dans la réalité je ferai 8 km.

Je suis partagé entre ces informations contradictoires, tout coureur dans la barrière horaire au Prarion est forcément finisher, et le pointeur me signifiant que je dois arriver avant 18h pour être classé.

Je décide de foncer et d’arriver avant 18h, je me sens bien, c’est un challenge excitant.

La descente est assez roulante mis à part la portion à flanc de montagne, le long de la piste de ski du Prarion. Je n’arrête plus de courir et pourtant, le temps file sans apercevoir les Houches.

Les premiers chalets se dessinent dans la forêt, très vite je rallie une portion bitumée, la fin est interminable. Je ne comprends pas, mais où est l’arrivée. Enfin, le lac des Chavants est en vue, les coureurs du SMAC (Saint Maximin Athlétique club) m’attendent, m’encourage, cela fait chaud au cœur, j’aperçois Matthieu.

Je franchis la ligne après 13h34 d’efforts à 18h04. Je suis heureux, je suis bien finisher, mais j’ai échoué sur les 13h30 de barrière officielle pour 4 minutes, après tous ces efforts.

Matthieu, m’apprendra son abandon au col de la forclaz, je pense que nous nous sommes croisés de peu à cet endroit. J’aurai aimé finir avec toi.

Un grand merci aux membres du SMAC, pour leur accueil et leurs encouragements si chaleureux à l’arrivée.

Une pensée, à ceux et celles qui n’ont pas fini cette course.

Un grand merci à Patricia et à Thierry pour leur gentillesse.

 

temps passage 2

 

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Commentaires
T
Merci champion pour ton clin d'œil ! <br /> <br /> Tu es incroyable de persévérance, je n'en reviens pas. Merci merci de nous embarquer dans tes périples incroyables grace à tes récits palpitants et tellement agréables à lire et tes magnifiques photos. À quand le prochain ? Hâte de te lire 😜😉
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