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Les trails de Tony
16 juin 2013

Le Trail du Verdon, 100 km, 6500 D+

 

profil verdon 100 km

trail verdon

Enfin avant, il faut déjà arriver à Aiguine, lieu du départ. Mat m’a prêté sa voiture, mais que se passe-t-il, je n’arrive plus à passer les vitesses ? La frayeur m’envahit, la voiture est immobilisée devant un portail d’une maison isolée, pleine campagne, et voilà que son occupant souhaite aller à sa visite médicale (pour l’anecdote). Voyant bien que la voiture a décidé de prendre un bain de soleil, il décide d’y aller en vélo ! Sympa.

Evidemment, le téléphone ne passe pas, je laisse des messages, pas de retour.

Que faire ?

L’instinct, me dicte de regarder la pédale d’embrayage, je m’aperçois qu’elle se coince et par miracle, je lui redonne du mouvement, la voiture peut reprendre sa marche triomphante.

Je respire de nouveau !

Arrivé au camping ! Sympa, belle vue sur le lac, que des coureurs. L’installation terminée, je me dirige à pied vers le retrait du dossard.

Dossard récupéré, je descends au lac, et je m’organise une petite baignade improvisée. L’eau fraiche me saisit, je suis bien, je commence à me concentrer sur la course.

De retour au camping, je commence à préparer mes affaires et bien-sur, impossible de mettre la main sur ce foutu dossard. Nouvelle frayeur ! Après avoir retourné deux fois la tente….

Souvenir, souvenir, j’ai eu un échange vif avec l’organisation sur la méthodologie de délivrance des dossards. Bref, j’y retourne avec mon ticket pasta party à 18H30. Evidemment, j’avais oublié mon dossard…Pas de tête, des jambes !

Rencontres de trailers à la pasta party, repas peu gastronomique pate fromage et pate bolo dans la même assiette, il en faut pour tous les goûts, discussions agréables et rencontre avec Anthony Salomone, qui finira 6ème (l’enfoiré).

Retour au camping.

Cette fois-ci, ça y est, je prépare mon body bag, couché 20H30, juste couché car bientôt les hordes de jeunes arrivent au camping pour faire la fête. Et merde, merci Mat pour ton conseil. Je suis encerclé de jeunes à la verve « draguante » et aux jeunes filles charmeuses.

Autant dire que la soirée a été longue, dans mon sac de couchage, yes, ils partent tous faire la fête, je vais enfin pouvoir me reposer.

Ding Dang Dong, 1h30 du mat, mon réveil sonne, le repos attendra, il est l’heure de se gaver avant la course, le marketing sur l’alimentation pour la performance à l’effort fonctionne à plein. Le tout pour finir à bouffer des tucs, des noix de cajou pendant la course, improviser un apéro dans le Verdon, au jus de minéraux. Bref, 2h30, je franchis la ligne d’arrivée, en vainqueur, je blague, le départ est dans 30 minutes.

L’attente du départ est longue, je suis vide, étrangement vide, mon esprit ne se fixe plus, ni sur la course, ni sur ma famille, rien, mon cerveau se détache, seul mon corps répond présent. Il emmagasine de la tension.

 Le corps et l’esprit s’ignorent mais l’un et l’autre se parlent…de façon invisible pour la conscience. L’inconscience est de le percevoir.

 3h00 : 5, 4, 3, 2, 1 départ.

100 km, 6500 D+,

Que vais-je devenir ?

Ca commence, au bout de 200m, impossible de courir la pente est trop raide, cela pendant plusieurs kilomètres. A la file indienne, les petites lucioles cherchent leur chemin.

Le grand Marges atteint, sommet dominant le Verdon, les premières lueurs du soleil apparaissent au loin, très loin. Mes bâtons en carbone, 3 brins télescopiques, me donnent confiance dans la suite de la journée, je sollicite moins les cuisses, je vais vaincre facilement les éléments.

Presque !

Sur les 4 premières heures de course, à bloc, je suis à 5.5 km/h de moyenne ! Le Verdon, un des trails les plus techniques, ils disent…Entre la caillasse, les marches naturelles plus hautes que mes 80 cm de jambes, la broussaille, et les pentes, la progression s’avère difficile.

Enfin le paysage est unique, le chemin le long des gorges du Verdon est tout simplement GRANDIOSE

 Au petit matin, le Verdon se découvre

 photo 1

 Comment on passe ?

  photo 2

 Les marches, plus hautes que mes petites jambes, juste une centaine de suite……à la frontale…

 photo 3

 L’eau n’est pas loin

 photo 4

 Eh oui, monsieur, Il faut d’abord monter sur le tronc pour atteindre le haut du rocher

 photo 5

Les crêtes du Grand Marges

 photo 6

 La France est contente, il fait 35° c.

 photo 7

Faut pas oublier les broussailles, le trail se transforme en course d’orientation,

Devinette voyez-vous le balisage ?

  photo 9

Bref avec toutes ces conneries, je sors des gorges en fin de matinée, fourbu et scotché par la chaleur. Je suis en retard sur mon plan de marche, qui est d’arrivé à mi parcours au bout de 11h.

Vivement le prochain ravitaillement ! Photo en train de grimper

Enfin de l’eau, ma poche est vide depuis un moment, 2 litres n’auront pas suffi sur 12 km !

Cette arrivée au ravitaillement 38 km, est salutaire, je sais que derrière il y a la fameuse montée dans la forêt à l’ombre, mais raide.

C’est reparti, enfin pas pour longtemps car très vite je sens une douce humidité envahir mon dos et merde, encore un problème de Camel bag.

1, 2, 3 fois je regarde, rien, je ne comprends pas, mais d’où vient cette flotte, le tuyau est pourtant bien fixé ?

Je bois un max avant de perdre toute mon eau et là je m’aperçois que j’ai vissé le bouchon de travers. Résultat, il doit me rester moins d’un 1 litre pour rejoindre Moustier, ravitaillement de mi-parcours. Il est midi 14 km à faire, je ressens un échauffement au niveau des pieds, cela ne sent pas très bon pour la suite.

Cette portion, va être très longue, 5 km encore à faire, je vois le village au fond du paysage, psychologiquement, je n’y suis plus, collé sur le chemin par la chaleur, mon esprit se focalise sur le retard que je suis en train de prendre. Je m’énerve, intérieurement je suis en colère, après rien après tout, signe que la fatigue m’envahit.

J’arrive à 15h, 12h d’effort pour 52 km, plus que 48 km.

Je demande un kiné, je me fais massé, c’est trop bon……… hélas, mes pieds sont cuits, j’ai deux énormes ampoules sur la totalité de la voute plantaire sur l’avant du pied.

J’ai une décision à prendre, j’arrête ou je repars pour une rando de 48 km à faire en 23 heures, car la barrière horaire limite est de 35h. Je me dis, c’est faisable, pour vous tous qui lisez ce récit, oubliez vos repères, les moyennes horaires de vos footings, moi aussi à ce moment, je suis aveuglé, et pourtant au fond, je sais, que la route va être longue pour arriver au bout.

Au bout de quoi, d’ailleurs, mon amour, si tu me voyais, tu me demanderais d’arrêter, pourquoi, pourquoi souffrir, tant d’abnégation, pour quelle mauvaise raison, l’orgueil, la vanité…

La folie…surement un peu, pour les autres certainement.

Je me défie avant tout, j’existe, oui j’existe, la vie est courte, je repousse mes limites, j’ai la prétention de maitriser ma destinée…..

Fais chier d’abandonner, je suis venu pour aller au bout, je ne vais pas renoncer, jamais, je mettrais pieds à terre.

Cette lutte contre moi, je sens que la gagne, je reprends des forces mentales, je suis prêt pour le combat.

Je repars, totalement libéré de la pression de la course, des km à faire, je savoure ce moment, je suis en osmose avec le vent, la montagne, les fleurs, cela va durer 30 km, je marche, je cours un peu, je fais partie de la nature, les quelques kilomètres le long des crêtes à la tombée de la nuit est un moment unique. C’est un des moments les plus forts de ma vie, inexplicable, je ne suis que plénitude.

Deux mètres me sépare du vide, pas de chemin, des dalles de pierres obliquent, j’en ai horreur, une ligne de vie se dessine, des petits rubans attachés aux épineux, virevoltent au vent.

Plus que 20 kilomètres, obligé de me faire soigner les pieds, bandés ils sont moins douloureux, survient un autre souci, une irritation à sang au niveau de chaque adducteur m’empêche de lever les jambes. Je retiens des cris de douleur, des larmes de souffrance s’accrochent à mes cils.

C’est le début de la nuit, les infirmières me donnent rendez-vous au petit matin, 10h pour faire 20 km !

Je repars dans la nuit, je cours seul depuis des heures, le parcours redevient difficile, on surplombe les gorges, la nuit m’enivre, j’ai l’impression de voler au-dessus des cailloux, à 1,5 km/h.

Le sommeil me saoule, je titube vers 3h du matin, je décide de m’allonger à même le sol pour dormir 10 minutes, le froid me tétanise, je tremble, impossible d’arrêter mes tremblements, je dois repartir…instinct de survie.

5h du matin, je me fais de nouveau masser, je m’endors sur un vrai lit, 30 minutes. Le bonheur, la fatigue s’endort aussi, reste cette irritation.

10 km, l’ascension du grand Marges et la descente vers l’arrivée, le jour se lève, le soleil réchauffe les corps des survivants de la nuit, la fin approche. Mes jambes avancent toutes seules, le Marges passé, je croise des coureurs qui partent faire leur footing dans la montagne, il me regarde d’une façon incrédule, entre incompréhension et incompréhension.

Cela veut dire que je m’approche de la civilisation, la descente vers Aiguine est le moment le plus pénible de ce périple.

Enfin, les premières maisons, j’arrive à 9h30 après 30h30 d’effort, j’aurais fait la deuxième partie à 2.5 km/h de moyenne !

Je franchis la ligne d’arrivée seul, pas d’officiel, obligé d’attendre 5 min pour trouver un organisateur pour officialiser mon arrivée. Il faut préciser que, j’arrive dans les derniers.

Très vite une solidarité, se met en place pour me prendre en charge, massage, soins, on me ramène en voiture au camping. Devant mon état de fatigue, les gens viennent me voir, m’adresse des félicitations, s’inquiète, c’est bon….

Je suis HEUREUX d’avoir réussi à rallier l’arrivée. Je me projette vers d’autres courses, j’en veux encore !

Mais pas le temps de tergiverser, il est 11h, je dois reprendre la voiture, faire 60 km pour retourner à Saint Maximin rendre la voiture à Mat. Repartir à 14H pour Aix en Provence, prendre mon TGV et arrivé à Paris à 18H30.

19H30 chez moi, je retrouve les miens.

Comment leur expliquer, mon WE, comment ?

Je souhaiterais tant partager mes joies, mes peines, avec toi mon amour, mais cela est impossible, Tu te perds devant tous mes sentiments si contradictoires, entre mon bonheur et mon corps meurtri, tu ne vois que les stigmates de la course. Toi aussi, tu penches vers l’incompréhension.

 Et pourtant j’ai tant besoin de toi.

 Merci à Mat : pour tes conseils, la logistique, à l’année prochaine sur cette même course. Mat, j’étais venu pour courir avec toi, enfin loin derrière, j’ai vécu un super moment.

 A vous tous qui m’avez soutenu, j’ai pu réaliser un rêve de devenir ultra-trailer.

 AT

 

 

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